Dans son scénario « central » présenté ce mardi, la Banque de France table sur une croissance de 2,3 % de l’économie française en 2022. En cas d’arrêt des importations européennes de pétrole et de gaz russe à partir du troisième trimestre, la hausse du PIB serait limitée à 1,5 % cette année, avant une récession l’an prochain.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie aura des répercussions économiques plus fortes que prévu dans l’Hexagone. Quelle que soit l’évolution du conflit et du bras de fer avec Moscou, il y aura moins de croissance et davantage d’inflation au cours des prochains mois.
C’est l’une des conclusions qui ressort des nouvelles projections macroéconomiques pour la période 2022-2024 présentées ce mardi par la Banque de France qui a travaillé sur deux scénarios. « L’incertitude est élevée mais moins qu’en mars 2020 », au début de la crise du Covid-19, estime l’institution.
Un impact de 2 points de PIB
Dans son scénario dit « central », le plus probable donc, le PIB devrait croître de 2,3 % en moyenne annuelle en 2022. Ce chiffre, nettement inférieur aux 3,4 % anticipés mi-mars, se rapproche du scénario dit « dégradé » présenté à l’époque (+2,8 %) et reflète avant tout le dynamisme de l’activité en 2021. Le budget 2022 de l’exécutif a été, lui, bâti à l’automne dernier sur une hypothèse de +4 % qui devrait être révisée dans les prochaines semaines.
Dans la réévaluation de la Banque centrale, la révision des comptes trimestriels effectuée par l’Insee n’est pas seule en cause même si elle compte pour 0,4 point. L’institution prévoit aussi un « ralentissement prononcé » de l’activité, affectée notamment par la flambée des prix de l’énergie et des matières premières. Ses projections retiennent en effet pour hypothèse un prix du baril à 105,8 dollars en moyenne sur l’année, contre 93 dollars anticipés en mars. Elles intègrent aussi le ralentissement de la demande des pays partenaires de la France. In fine, le coût de la guerre en Ukraine serait ainsi de l’ordre de 2 points de PIB sur la période 2022-2024, selon ses calculs.
Pouvoir d’achat en baisse de 1 point
En parallèle, l’inflation sera « plus forte, plus large et durera davantage » que ce qui était anticipé auparavant. Elle atteindrait 5,6 % dans l’Hexagone cette année, selon l’indice harmonisé Eurostat, demeurant inférieure à celle de la zone euro grâce au bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité (en supposant qu’il soit maintenu jusqu’à la fin 2022). Sans la mesure, elle serait 1,2 point supérieure.
Le pouvoir d’achat par habitant reculerait néanmoins cette année, de 1 %, après avoir augmenté de 2 % en 2021, selon la Banque de France qui a intégré les dernières annonces de l’exécutif jusqu’à fin mai.
La consommation des ménages en pâtirait même si ces derniers devraient puiser dans leur surplus d’épargne pour faire face à la hausse du coût de la vie. Malgré une bonne résistance de l’emploi, permettant au taux de chômage de poursuivre sa baisse à 7,4 % cette année, l’atterrissage serait brutal : la croissance du PIB ne serait plus que de 1,2 % en 2023. Elle remonterait à 1,7 % l’année suivante. A politique économique inchangée, le ratio de dette publique atteindrait 112 % PIB cette année avant de se stabiliser autour de 109 %.
Les projections de la Banque de France ne prennent pas en compte les aléas économiques créés par la recomposition de l’Assemblée nationale après les élections législatives.
Inflation à 7 % en 2023
Alors que Moscou accroît la pression sur les pays occidentaux en leur coupant peu à peu le gaz , l’institution bancaire a aussi présenté un scénario « défavorable », construit sur deux hypothèses : un arrêt total des importations européennes de pétrole et de gaz russe à partir du troisième trimestre 2022 et des tensions « exceptionnelles » sur les prix des hydrocarbures. L’économie française afficherait alors une croissance limitée à 1,5 % en 2022 et entrerait en récession en 2023 avec une chute du PIB estimée à 1,3 %.
De son côté, sous l’effet du choc des prix du pétrole et du gaz, l’inflation monterait à 7 % l’an prochain avant de retomber à 0,7 % refroidie par une baisse prononcée des prix de l’énergie et les effets désinflationnistes du recul de l’activité.
Le scénario « central » prévoit en revanche un ralentissement progressif de la hausse des prix. Celle-ci reviendrait à 3,4 % en 2023 puis à 1,9 % l’année suivante soit la cible visée par la Banque centrale européenne (BCE) à cet horizon. En 2024, ce sont principalement les services qui alimenteraient la hausse des prix.
Source: Les Echos